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CRéER DES MONNAIES RéGIONALES POUR TRAITER LA CRISE GLOBALE

2010-03-13 02:06:00
Samedì 02:08:47
Mars 13 2010

CRéER DES MONNAIES RéGIONALES POUR TRAITER LA CRISE GLOBALE

par Bernard LIETAER. Research Fellow à luniversité de Californie à Berkeley - Ancien haut fonctionnaire de la Banque Nationale de Belgique - Architecte monétaire qui a contribué à la création de lECU - Auteur du livre : Monnaies régionales : des nouvelles voies vers une prospérité durable (Charles Léopold Mayer, 2008).
Séance du 13 mai 2009 organisée en collaboration avec lIRE (Initiative internationale pour repenser léconomie) et Prospective 2100
Compte rendu rédigé par Yves Dougin

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words 7.0K read in 34 minutes, 51 Seconds

En bref

La crise bancaire et financière fait la une des médias depuis des mois.
Pourquoi est-elle plus grave que les précédentes ? Quelle en est lorigine systémique ? Pourquoi les solutions conventionnelles (baisser les taux dintérêt, renflouer les banques, relance keynésienne) ne suffiront-elles pas ? De plus, nous savons quelle coïncide avec dautres défis planétaires sans précédent comme le changement de climat, les effets économiques du vieillissement des populations, et la mutation technologique qui découple la croissance et lemploi.
Quelles innovations monétaires sont disponibles dès aujourdhui pour résoudre structurellement ces défis, et changer cette crise en une opportunité ? Que peuvent faire les états, les entreprises, et les citoyens eux-mêmes, pour éviter dêtre entraînés dans la débâcle bancaire ? Voici les questions qui seront traitées pendant cette soirée.


EXPOSé de Bernard LIETAER

La crise que le monde traverse actuellement sinscrit totalement dans lactualité lorsquil sagit dévoquer les problèmes quelle pose. Mais elle disparaît aussi rapidement du paysage dès lors quon évoque les solutions qui permettraient de la résoudre durablement.
La dimension de cette crise prend toute sa mesure lorsque lon examine la rapidité et lampleur de leffondrement de la capitalisation boursière des plus grands groupes financiers internationaux auquel elle a donné lieu. La valeur boursière de Citygroup est ainsi passée de 255 milliards de dollars au second trimestre 2007, à 19 milliards en janvier 2009. Celle de la Deutsche Bank de 76 à 10,3 milliards… Nous navons jamais connu une telle simultanéité au niveau mondial. De multiples raisons ont été invoquées pour expliquer ce séisme. On parle dabsence de régulation, derreur individuelle ou collective, mais jamais du système monétaire lui-même. Ma thèse, cest que ce système est devenu structurellement fragile parce quil est systémiquement instable. Je vous propose une métaphore pour illustrer mon propos : imaginez une voiture qui na pas de frein, dont le volant ne fonctionne pas bien, et avec laquelle je vous propose de traverser les Alpes…. Jignore quand, et à quel moment surviendra laccident, mais je sais de façon certaine quil aura lieu. Et lorsque celui-ci se produit, tout le monde accuse le conducteur. Mais personne ne parle de la voiture, qui, vous lavez compris, symbolise dans cette histoire notre système monétaire : celui-ci montre de graves signes de dysfonctionnement, mais nous sommes pourtant prêts à nous ruiner pour essayer de le reconstruire à lidentique.

176 crises monétaires en 25 ans

Il y a eu 96 crises bancaires et 176 crises monétaires au cours des 25 dernières années. Elles nétaient pas toutes dues au problème des subprimes. Laccident se répète périodiquement mais nous continuons de traiter chaque nouvelle crise comme sil sagissait de la première. Et à chaque fois, laddition pour la remise en état de la voiture est plus salée. Pour la seule crise des subprimes, Bloomberg évalue limpact financier du sauvetage des banques américaines à 7,7 trillions de dollars, soit 50 % du PNB américain ! (NB un trillion = mille milliards). Pour remettre tout cela en perspective, on peut rappeler que le plus gros coût de toute lhistoire des états-Unis a été le financement de leur participation à la Seconde Guerre mondiale, soit 288 milliards de dollars de lépoque. Réajusté du niveau dinflation, cela donnerait aujourdhui 3,6 trillions. Quand on ajoute à cette somme, toujours en tenant compte de linflation, le coût de lachat de la Louisiane, le New Deal, le Plan Marshall, le budget la Nasa pour lexpédition de lhomme dans la lune, la crise des Savings and Loan entre 1986 et 1996, la guerre de Corée et celle du Vietnam, on obtient un total de 6,95 trillions de dollars. On est encore en dessous de ce qui a été dépensé en quelques mois pour tenter de colmater les effets de la crise actuelle. On est bien sur un terrain sans précédent…

Labsence de diversité nuit à lefficacité

Les options prises pour gérer ces crises – quil sagisse de racheter et disoler les actifs toxiques ou de nationaliser partiellement les banques – constituent des solutions ponctuelles qui ne permettent pas den résoudre les causes : on continue de rouler dans la même voiture…
Pour essayer davancer dans nos réflexions et de voir dans quelle mesure des solutions systémiques sont imaginables, je vous propose de changer de poste dobservation et de nous rapprocher des théoriciens de la complexité. Le professeur décologie théorique américain Robert Ulanowicz est de ceux-là. Il travaille depuis 25 ans sur des modèles permettant de quantifier les réseaux écologiques naturels. Le résultat de ses recherches, publiées il y a moins de deux ans, montre que la durabilité dun réseau complexe est mesurable et que son équilibre optimal se situe entre lefficience et la résilience, comme montré dans le graphique suivant. Un système en réseau complexe nest viable qua condition quil y ait ni trop peu, ni trop de diversité et dinterconnectivité.

Un système avec trop peu de diversité sera peut-être très efficace, mais il devient aussi de plus en plus fragile.. En revanche, si lon va trop loin dans la diversité, le système stagne par manque defficacité et de directivité.

Les monnaies complémentaires, une réponse aux crises

Nous pouvons appliquer cette théorie au système monétaire, puisquune économie mondiale est en fait un réseau dans lequel circulent les monnaies officielles. Le niveau de diversité qui y prévaut est faible. Toutes les monnaies conventionnelles sont exactement du même type : elles sont toutes créées comme des dettes bancaires. De plus, on a toujours justifié le monopole dune monnaie unique dans un pays au nom de lefficacité. Et cest vrai : une monnaie nationale unique favorise les échanges entre les citoyens de ce pays, et rend la formation des prix plus efficace dans lespace national. En 1955, léconomiste Milton Friedman a démontré que le système monétaire mondial serait plus efficace sans aucune barrière règlementaire,. Et il avait raison puisque après la dérégulation le volume des échanges financiers internationaux a explosé. Ce que je ni Friedman, ni aucun autre économiste pouvait comprendre est que nous avons ainsi rendu le système mondial terriblement fragile, comme on peut voir sur le graphique lorsquon pousse trop loin vers lefficacité.
La solution se trouve donc dans la diversité monétaire par lintroduction de monnaies autres que les monnaies conventionnelles : des monnaies locales, régionales, ou fonctionelles. . Lorsquelles apparaissent, ces monnaies augmentant la diversité et les interconnections du système économique. Elles diminuent son efficacité, mais améliorent sa capacité de résilience. Elles permettent par ailleurs de résoudre des problèmes très divers auxquels nous devons faire face aujourdhui, depuis la gestion des conséquences économiques du vieillissement de la population, ou les problèmes de développement durable.

Remettre en cause nos certitudes

Pour mieux comprendre comment lapport de monnaies complémentaires peut permettre de résoudre les causes systémiques des crises monétaires et financières, il faut dabord revenir sur deux postulats de base sur lesquels sappuie lenseignement de léconomie. Mais qui sont malheureusement faux. Le premier stipule que largent est un instrument déchange neutre naffectant ni le type des transactions, ni lhorizon ou les types d‘investissements, ni les relations entre les utilisateurs. La seconde hypothèse stipule que les « choses sont comme elles sont » et que, par conséquent, le système financier tel que nous le connaissons est un fait établi et immuable : aucun des cours déconomie que jai pu consulter névoque lhypothèse dun système monétaire différent de celui que nous possédons. Pour le commun des économistes, le système monétaire nest donc pas une variable de décision. Il est une donnée de base supposément immuable. Il existe pourtant de nombreuses preuves empiriques et académiques qui montrent que leffet du type dargent utilisé nest pas neutre ni sur la transaction, ni sur la relation entre les utilisateurs. Jajouterais enfin que lorsque lon introduit des monnaies complémentaires, on constate que les gens agissent de façon différente avec elles.
En voici un exemple : lorsque vous utilisez les Miles qui vous sont offerts par votre compagnie aérienne, vous utilisez une monnaie complémentaire qui a pour objectif de vous orienter dans votre façon de consommer le transport aérien. Elle renforce votre fidélité au groupe de lignes daviation qui les émet. Cette monnaie complémentaire fonctionne en parallèle avec la monnaie classique, elle nest pas créée par les banques, comme le sont toutes les monnaies classiques, et elle nest pas affublée dun taux dintérêt. Elle nest utilisable pour spéculer. Et pourtant, 14 trillions de Miles existent à travers le monde et 1,5 trillion dunités sont créées chaque année. On voit bien quil ne sagit pas dune affaire marginale. Malgré cela, personne nen parle…

Du Mile au WIR

Laissez-moi vous raconter une autre histoire. Celle de 16 hommes daffaires suisses qui se retrouvaient périodiquement dans un café à Zurich dans une période de crise semblable à la nôtre. Ils se plaignaient beaucoup : leur banque – ou celle de leurs clients – venait de leur annoncer quelle allait réduire leurs lignes de crédit. Faute de ce soutien, certains dentre eux se voyaient dans limpossibilité de payer à leurs fournisseurs ce quils avaient prévu dacquérir. Ils ont alors décidé de sentendre de façon à pouvoir continuer à faire des transactions directement entre eux, plutôt quavec largent de leurs banques. Les uns – ceux qui achètent – comptabilisent des débits envers les autres – ceux qui vendent. à linverse, ces derniers bénéficient de crédits envers les premiers. Ces débits et ces crédits sont exprimés dans une monnaie commune qui sappelle le WIR. Ce système monétaire, qui existe depuis 1934, est aujourdhui utilisé par un quart des entreprises suisses. Les échanges interentreprises libellés en WIR représentent près de 2 milliards deuros par an. La Banque coopérative WIR, dont le siège est à Bâle, compte 75 000 PME clientes. Là encore, personne nen parle. Ce qui est fascinant dans cette histoire, cest que le professeur déconomie américain James Stodder, qui a réalisé une étude sur limpact du WIR, a démontré que la stabilité de léconomie suisse, sa grande capacité de résilience par rapport aux économies voisines, sexplique par lexistence de cette monnaie parallèle. Celle-ci fonctionne spontanément à contretemps par rapport au franc suisse. à chaque fois quil y a une récession dans léconomie du pays, le volume des échanges en WIR augmente. Inversement, lorsquelle retrouve le chemin de la croissance, le volume des WIR en circulation diminue. Tout simplement parce que tout homme daffaires normalement constitué préférera – si je lui donne le choix – être payé en francs suisses – qui lui permettront dacheter partout dans le monde – plutôt quen WIR, quil ne peut échanger quavec les 75.000 autres membres dans les limites de son propre pays. Si, en revanche, le crédit en monnaie nationale se resserre, le même homme daffaires préférera passer une transaction en WIR plutôt que de ne pas vendre du tout.

Convaincre les banques

Le problème, cest que les banques naiment pas les monnaies complémentaires. Et on les comprend. Personne nabandonne de gaîté de coeur une situation de monopole, quelles exercent à la fois sur la création de monnaie et sur le contrôle des échanges… Cest un peu comme expliquer les bénéfices du logiciel libre à Bill Gates. Ces nouveaux logiciels se sont pourtant développés sans lui, preuve que la bataille est jouable. Dautant plus que ces systèmes monétaires parallèles existent et que les monnaies complémentaires se développent partout dans le monde. Lorsque jai commencé à mintéresser à ce phénomène, au début des années 1990, il y avait environ 300 monnaies complémentaires dans le monde, dont le WIR. Il y en a aujourdhui plus de 5 000 ! Pour limmense majorité dentre elles, il ne sagit pas de systèmes commerciaux mais de modèles à vocation sociale, dune trop petite échelle pour résoudre notre problème dinstabilité financière chronique et planétaire. Mais je compare tout cela à laéronautique des frères Wright : on avait montré au début du XXe siècle que voler devenait possible. On sait désormais que les monnaies complémentaires, cest possible. Il faut maintenant les organiser correctement et à une échelle où elles peuvent faire une différence. De ce point de vue, je peux vous citer de très nombreuses expériences extrêmement intéressantes et prometteuses. Le Time Dollar, par exemple, sappuie sur des échanges de services basés sur une comptabilité de débits et de crédits exprimés en heures entre individus. Lheure totalisant 60 minutes dans la plupart des pays du monde, les risques dinflation sont nuls… Il existe aujourdhui environ 400 réseaux Time dollars dans le monde.

Des monnaies pour lutter contre lisolement

Au Japon, une expérience de monnaie complémentaire permet de réduire le problème financier posé par le vieillissement de la population, lun des défis majeurs de lhumanité pour la prochaine décénie. Près de 20 % de la population japonaise a plus de 65 ans et 1,8 million de personnes ont besoin dune aide journalière. Il sagit dun problème impossible à gérer durablement dans le cadre dun monopole monétaire conventionnel… Dans le système japonais Fureai Kippu, mis en place par monsieur Tsutomo Hotta, la monnaie complémentaire permet de financer toute aide qui nest pas couvert par lassurance maladie : laide à domicile, laccompagnement, le soutien moral, les achats, préparation de nourriture, etc. Lorsque je rends un service à une personne âgée dans mon quartier, je suis crédité du temps dépensé sur un compte épargne électronique. Je peux les utiliser pour rémunérer quelquun qui viendra maider le jour où je serai malade. Ou bien les transférer à ma mère, pour quelle rémunère un membre du réseau installé dans sa région en échange de son aide. Il y a 487 systèmes de ce type au Japon, qui viennent en aide à des centaines de milliers de personnes. On peut également citer le réseau de Yamato Love – pour LOcal Value Exchange – initié par la mairie de la ville de Yamato qui compte 700 000 habitants. Un tiers des habitants utilisent ce système de monnaie complémentaire, chacun créant son propre sous-système à partir dune carte à puce qui permet de comptabiliser et deffectuer les échanges. On peut parler aussi dIthaca Hours1 une monnaie locale créée en 1997 à Ithaca, dans létat de New-York, ou encore du réseau allemand Regio (RegioNetzwerk) dont 28 systèmes locaux sont déjà opérationnels, et 35 autres en formation. Le plus connu est le Chiemgauer 2 qui fonctionne dans le sud de la Bavière . En France, enfin, le système SOL sappuie sur une carte à puce du type de celle qui existe à Yamato. Ce système porte trois types de monnaies : une monnaie interentreprises – le SOL Coopération – dont lunité est équivalente à lEuro ; une monnaie sociale – le SOL Engagement – dont lunité est le temps, comme pour le Time Dollar ; et enfin une monnaie sociale affectée en Euros sur le modèle des « chèques-repas »..

Passer à la vitesse supérieure

Des projets plus ambitieux sont en train de voir le jour. Sept villes européennes – dont Dublin, Bristol, Bremen et Bruxelles – devraient lancer lhiver prochain un projet Interreg dont le but est la création dune monnaie favorisant la réduction carbone. Le principe est très simple : lorsque vous achetez une ampoule basse consommation par exemple, vous recevez un certain nombre de points. Ces points sont utilisables pour acquérir dautres biens « verts » qui participent à la réduction des gaz à effets de serre. Vous pouvez par exemple les utiliser pour payer votre facture délectricité « verte ». Cette monnaie affectée donne une direction à léconomie elle-même à travers le consommateur. Cest beaucoup plus efficace que les systèmes de subsides conventionnels. En Californie par exemple, vous recevez 2 000 dollars si vous achetez une voiture hybride. Mais rien ne vous empêche dutiliser cette somme pour acheter un billet davion pour Hawaï, qui réduira à néant leffort écologique consenti lors de lachat de votre véhicule.
Un autre projet, porté par le gouvernement de la région Flandres en Belgique, porte sur la création dun écosystème de monnaies complémentaires. Plusieurs monnaies cohabiteront et chacune se verra affecter un rôle spécifique dont le choix est en cours. Les échanges se feront par lintermédiaire de téléphones portables ou de cartes didentité électroniques utilisables comme mode de paiement. Ce regroupement doit permettre datteindre une certaine taille critique et de mesurer leffet de ces monnaies sur léconomie. Nous avons de bonnes raisons de croire que la dynamique sera très positive.

Un WIR Européen

La dernière initiative dont je souhaitais vous parler concerne linternationalisation du WIR suisse. Lobjectif de ce projet est de parvenir à réaliser des transactions triangulaires transfrontalières avec cette monnaie locale telle quelle existe aujourdhui en Suisse. Les premières transactions pilotes sont actuellement en phase de montage. Un groupement dachat constitué des entreprises suisses qui utilisent déjà le WIR, ainsi quune centrale de compensation internationale fonctionnant en coopération avec la banque WIR, devrait soutenir le réseau afin de permettre à ces entreprises dacheter à létranger. Les échanges ainsi générés pourraient représenter initialement par pays participant environ 50 millions deuros de chiffre daffaires annuel. Sur le même modèle, nous réfléchissons à la création dune monnaie interentreprises utilisable à lintérieur de la zone Euro. Je recherche actuellement une banque capable de nous suivre dans ce projet de double monnaie. Il existe déjà des banques de ce type : au Brésil, 150 banques à double monnaie ont été lancées ces trois derniers mois afin de résoudre des problèmes sociaux. Ces banques proposent des microcrédits à la fois en monnaie nationale et en monnaie locale.
Ces systèmes parallèles peuvent nous permettre de résoudre la plupart des problèmes structurels que notre système économique et monétaire actuel ne parvient pas à traiter. Pour vous en convaincre, faites une liste des projets qui constituent de bonnes idées à vos yeux, mais qui ne se réalisent pas faute dargent. Pourtant, les expériences dont je viens de vous parler montrent que presque nimporte quoi pourrait se substituer à cet argent qui manque. Dans cette perspective, les monnaies régionales apparaissent comme des outils de développement très efficaces, sans pour autant exclure la mondialisation : je peux accepter que cet ordinateur soit fabriqué là où il sera le moins cher à produire et quil soit payable en monnaie nationale, mais vouloir également que mes pommes viennent de ma région et que je puisse les acheter en monnaie régionale… Les deux systèmes peuvent tout à fait cohabiter. Tout dépendra de notre capacité à changer nos mentalités.

DéBAT

Penser notre futur

Un intervenant : étant moi-même à lorigine du projet français SOL, je suis évidemment convaincu de lintérêt des monnaies complémentaires. Lune des raisons de cet intérêt réside dans le fait que les monnaies complémentaires, qui sont des monnaies affectées, possèdent un puissant effet de levier. Je mexplique : si vous injectez 100 euros pour résoudre un problème de santé, le premier bénéficiaire de cet argent pourra lutiliser pour acheter un téléviseur coréen ou japonais. Limpact de vos 100 euros sur cette problématique de santé sera donc de 100. En revanche, si vous donnez à cette même personne une monnaie affectée à la santé, elle devra lutiliser pour résoudre à son tour un problème de santé en rémunérant une seconde personne, puis une troisième, une quatrième et ainsi de suite. Dans ce cas, limpact financier de 100 unités initiales sera de « n X 100 », n étant le nombre de personnes par lintermédiaire desquels ces 100 unités vont circuler. Le fait davoir des monnaies affectées à une problématique spécifique accroît limpact de votre injection de monnaie. Par ailleurs, ces monnaies affectées à une population donnée, ou à un usage donné, sont philosophiquement nécessaires au développement durable qui est une culture locale de non-expansion. Elles sont donc nécessaires pour penser notre futur.
Après ces remarques, jaimerais savoir ce que vous imaginez comme architecture pour bâtir le système européen que vous évoquez : sagit-il dune internationalisation progressive du modèle suisse des WIR ou est-ce un système dans lequel cohabiteraient des monnaies bretonnes, irlandaises et basques ? Où en êtes-vous de vos réflexions ?

Bernard Lietaer : Je pense quil y a deux univers dans lesquels il faut être actif : le monde des affaires et de lemploi, qui est étranglé par la raréfaction du crédit, et le monde civil, qui inclut la sphère sociale. Pour lunivers des affaires, je pense quil faut dabord mettre en place un système monétaire parallèle qui puisse fonctionner à lintérieur de la zone euro. Il faut le concevoir à léchelle européenne à partir dunités régionales constituées de groupes dentreprises qui acceptent de travailler ensemble et de régler une partie de leurs échanges en monnaie complémentaire. Mon idée, cest de travailler au niveau régional – la Bretagne par exemple – en ce qui concerne ladministration et lorganisation de ces groupements dentreprises, mais de concevoir lensemble du système à léchelon européen afin dharmoniser lunité monétaire de référence et de mieux gérer les problèmes de sécurité. Au niveau des monnaies civiles ou sociales, qui ont pour objectif dinduire des actions non spontanées et de les orienter dans une direction utile pour la communauté, mon idée est de travailler au niveau des villes. à Gand, la ville pilote du projet flamand, entre trois et cinq monnaies seront introduites qui utilisent le même systeme de payment, mais qui ont chacune des rôles specifiques : lapprentissage, réduction démissions de carbone, encourager les jardins commestibles urbains, etc. De plus, une monnaie régionale va sarticuler autour de la culture. Un budget de 1,7 million deuros est prévu pour être consacré à des activités culturelles. En plus des subventions classiques pour les troupes de théâtres ou des organisateurs de concerts, nous allons le distribuer directement aux utilisateurs locaux sous forme de monnaie affectée. Les habitants peuvent choisir librement à quel genre de spectacle ils veulent assister, au même titre quils peuvent choisir de payer leur entrée en euros. Mais ceux qui nont pas les moyens peuvent décider daider un voisin, de donner des cours de maths, en échange de ces fameux points… Les villes sont des laboratoires parfaits pour ce genre de démarches. Lidée étant de faire coïncider les « villes à intention » – une intention culturelle dans lexemple de Gand, mais cela peut être une intention dapprentissage ou de développement durable – et les « économies à intention ». Les monnaies complémentaires sont là pour créer les passerelles entre les deux.

Et la solidarité nationale ?

Int. : Je perçois bien lintérêt des monnaies locales. Jai cependant une question concernant les monnaies complémentaires à plus grande échelle, telles que vous les présentez. Nous avons besoin aujourdhui dune solidarité nationale pour financer léducation, les retraites, le RMI, dont la population a besoin. Si nous créons des systèmes avec des monnaies parallèles, qui paie la TVA, les impôts ou les charges sociales ? En quoi cela contribue à la solidarité nationale ?

B. L. : La solidarité nationale fera de plus en plus défaut dans le cadre économique actuel. Les monnaies complémentaires peuvent justement aider les gouvernements à traiter ce problème : il suffit de définir des monnaies à vocation purement sociale, et de les détaxer. Pour la simple raison quelles servent à résoudre des problèmes qui, sans elles, coûteraient aux contribuables. Le Time Dollar, dont je vous ai parlé tout à lheure, est officiellement exempt dimpôts. En revanche, tous les échanges commerciaux réalisés à laide de monnaies comme le WIR sont aujourdhui taxables en monnaie nationale. Je suggère toutefois quune partie de ces taxes puissent être réglées dans la monnaie complémentaire que les entreprises acceptent entre elles. Cela permettrait en retour à létat dacquérir, avec cette monnaie auprès de la communauté dentreprises qui laccepte, une partie des biens ou des services dont il a besoin. Cela permettrait de créer de lactivité additionnelle tout en montrant lexemple.

Un standard contre le troc

Int. : Je me souviens dune séance de lécole de Paris ou lorateur était venu nous parler des réseaux réciproques déchanges de savoirs, dont elle est à lorigine3. Le principe en est le suivant : échange leçons de comptabilité contre leçons de piano. Cela fait résonance avec ce que vous évoquez mais il ny a pas de monnaie. Est-ce que cela vous paraît de même nature ?

B. L. : Cest de même nature. Toutefois, comme dans tout troc, linconvénient du système réside dans le fait que ce type de transaction ne possède pas de standard. Le meilleur professeur de piano nest pas forcément celui qui a besoin de mes leçons danglais. Dans ce cas, il ny a pas de transaction possible. Rien ne soppose en revanche à ce quils adoptent une unité de compte commune – lheure, par exemple – qui permet de faciliter la transaction. Le « bon » professeur de piano est alors payé en heures et non plus en cours danglais. Il peut en disposer pour soffrir le service dont il a besoin. Et je peux fournir mes cours danglais à une autre personne de ma communauté qui désire apprendre cette langue.

Et le risque communautariste ?

Int. : Je souhaiterais vous soumettre mes interrogations quant aux effets quentraînerait le développement à grande échelle de monnaies complémentaires telles que celles que vous décrivez. Je vois cinq remarques qui pourraient être formulées ainsi : la première porte sur les questions de régulation, dont labsence est en partie à lorigine de la crise que nous connaissons. Quels seraient les systèmes de régulation si le WIR séchangeait entre 600 millions dEuropéens ? Quid ensuite des phénomènes mafieux ? Ma troisième interrogation concerne le risque communautariste. Ma quatrième remarque porte sur le risque denrichissement des banques grâce à leur activité de « changeur » de monnaies : devant laccumulation dargent dans le système, il faudra bien rééquilibrer moyennant le prélèvement dune commission. Ma dernière remarque, enfin, concerne les emplois que lon risque de détruire dans léconomie classique en les créant dans une économie parallèle. De fait, le temps consacré aux échanges que vous évoquez, pour gérer les problèmes de vieillissement par exemple, ne sera pas utilisé à la création « classique » de richesses, permettant le paiement de pensions aux retraités. De ce point de vue, le bouclage macroéconomique ne me parait pas garanti.

B. L. : Les deux premiers points que vous évoquez représentent des dangers potentiels réels. Mais ils peuvent être résolus de la même façon : tous les systèmes dont je vous ai parlé sappuient sur une transparence totale vis-à-vis des utilisateurs de la monnaie. Avant que jengage une transaction avec vous, jai le droit de regarder votre compte en monnaie complémentaire et vous avez le droit de regarder le mien. Cette transparence rebute en général la mafia, qui préfère les systèmes anonymes et opaques. Quant au risque denrichissement des banques sur lactivité de change, celui-ci nest possible que sil existe une convertibilité automatique. Ce nest pas le cas pour les monnaies complémentaires : le WIR existe depuis 75 ans et nest pas convertible en francs suisses. De la même manière, le Time dollar nest pas convertible en dollars : lunité reste lheure. Les créateurs de cette monnaie présument dailleurs que le temps a la même valeur pour tout le monde. Du coup, aucun dentiste naccepte de se faire payer en Time dollars. Mais si vous voulez faire fonctionner le système dans une société complexe et diversifiée, vous pouvez adapter le système et permettre quun dentiste ou un médecin puisse être rémunéré deux ou trois heures en Time Dollars pour 20 minutes de consultation. Si vous êtes daccord avec cette proposition, cela peut tout à fait fonctionner.

Un emploi ou un travail ?

Votre remarque sur lemploi soulève un problème central. Jy répondrai de façon plus radicale. Je prétends que lidée selon laquelle il existe un emploi pour chacun est en train de disparaître avec lère industrielle. En revanche, je fais la distinction entre ce que les Anglais nomment un « job » – une activité ou un métier que lon pratique pour gagner de largent – et ce quils appellent « work » pour exprimer lactivité que lon exerce par passion. Pour faire la distinction entre les deux, il suffit de se poser la question suivante : si javais suffisamment dargent pour vivre confortablement jusquà la fin de mes jours, continuerais-je à exercer le métier que je fais ? Si la réponse est « oui », il sagit dune véritable passion. Dans le cas contraire, il sagit seulement dun emploi, dun « job », comme pour limmense majorité des gens dans le monde. Et bien je pense que le monde des « jobs » est mourant : nous navons plus besoin de 6 milliards dindividus pour produire les biens et les services dont nous avons besoin. Lemploi nest pas la solution du futur. Le travail lest. Les monnaies complémentaires permettent dune certaine manière de rémunérer ce travail, et den faire une priorité. Pour répondre à votre question sur le communautarisme, jai besoin que vous me précisiez ce à quoi vous faites allusion.

Int. : Je voulais évoquer le risque de création de circuits déchange fermés quentraîne lutilisation de monnaies complémentaires utilisables dans une communauté restreinte.

B. L. : Je vous avoue que je ne vois pas en quoi cela pose un problème déchanger un cours de guitare contre une leçon de plomberie. Dans lun des scénarii développés dans mon livre, The Future of Money, jévoque un monde dans lequel il ny aurait plus que des monnaies complémentaires locales sans lien les unes avec les autres. Ce nest pas de cela dont je parle. Un tel scénario signifierait une rupture complète avec léconomie conventionnelle, ce qui me semble ni désirable ni probable.

Un pont entre besoins sans réponse et ressources sous-employées

Int. : Si vous deviez convaincre les responsables politiques dune ville daccepter une monnaie complémentaire, quelles questions leur poseriez-vous ?

B. L. : Je leur demanderais quels sont les besoins et les objectifs qui ne sont pas remplis à léchelle de cette ville. En dautres termes, que leur manque-t-il ? Je leur demanderais enfin quelles sont les ressources quils estiment sous-employées dans cette même ville : les gens sans travail, les espaces vides et inoccupés, la nourriture non consommée… Il y en a beaucoup plus quon ne le pense. La monnaie complémentaire est une manière de construire un pont entre ces besoins sans réponse et ces ressources inexploitées.

Int. : Ce que vous dites me fait penser à ce que Keynes évoquait dans son essai Perspectives économiques pour nos petits enfants publié en 1930, dans lequel il prédisait avec humour une dépression nerveuse universelle le jour où 15 heures de travail hebdomadaire suffiraient pour produire tous les biens dont nous avons besoin : il est parfois difficile de savoir sorganiser sans ce « job » qui nous fait vivre… Ma première question porte sur larticulation entre la monnaie complémentaire et la monnaie principale. Une entreprise qui accepte le WIR peut-elle lutiliser pour payer son personnel ? Celui-ci accepte-t-il cette forme de rémunération et peut-il, avec cette monnaie, acheter ce quil souhaite ? Ma seconde interrogation concerne la notion de confiance, indispensable pour quune monnaie puisse séchanger. Comment sétablit-elle ? Léchelle régionale est-elle à votre avis plus propice à lémergence dun tel sentiment ?

B. L. : En Suisse, en dehors des entreprises industrielles, les secteurs de lhôtellerie et de limmobilier acceptent les paiements en WIR. Une partie du salaire peut être payée en WIR. La prime de fin dannée peut lêtre, cela se fait de gré à gré. Il existe dailleurs un petit catalogue qui indique tous les hôtels et les restaurants qui acceptent les WIR en Suisse. Ces échanges ne représentent pas le gros des transactions en WIR, mais cela existe. En réponse à votre seconde question, je répondrais que la monnaie et la confiance sont une tautologie. On peut créer la confiance – au sein dune communauté par exemple – et bâtir une monnaie basée sur cette confiance, ou bien créer la monnaie justement dans le but de créer de la confiance et du lien entre les gens. Dans de nombreux cas, les monnaies complémentaires sont dabord créées pour que les habitants dun quartier se parlent !

Le Wara, une monnaie fondante

Int. : Pourriez-vous nous parler du Wara, cette monnaie régionale qui a été créé en Autriche avant la guerre ?

B. L. : Le Wara est en réalité né en Allemagne, pour être précis elle fut mise en circulation en 1931 à Schwanenkirchen, une petite ville minière de Bavière. à lorigine, cette monnaie était basée sur un kilo de charbon. Deux mille entreprises allemande lacceptaient entre elles, la préférant à la monnaie nationale de lépoque. Ce nest quaprès son interdiction par le ministre allemand des Finances que les Autrichiens de la commune de Wörgl sen sont inspirés, sous limpulsion du maire de la ville. La monnaie de Wörgl était une monnaie fondante, qui avait une taxe de 1 % de sa valeur tous les mois afin de limiter sa thésaurisation. Le Chiemgauer allemand, dont jai parlé tout à lheure, est aussi une monnaie fondante. Pour maintenir à jour la valeur de votre argent, vous devez, chaque trimestre, coller sur chaque billet un timbre représentant 2 % de sa valeur faciale. Lidée est déviter den faire un instrument dépargne mais plutôt de favoriser sa fonction dinstrument déchange.

Int. : Il existe aujourdhui des moyens de paiement performants dans la sphère du commerce, comme la carte Visa, par exemple, mais comment imaginez-vous lavenir des moyens de paiement de personne à personne ?

B. L. : Je pense que le téléphone mobile constitue le meilleur support pour les échanges de personne à personne. Les fonctions permettant lactivation dun porte-monnaie électronique existent déjà sur la plupart des téléphones. Il suffit de les activer. La technologie est là. De façon paradoxale, les moyens de paiement les plus avancés pour les monnaies complémentaires se trouvent dans les pays en développement comme le Kenya ou le Kazakhstan. Pour la simple raison que dans ces pays-là, il ny a pas de banque à courtcircuiter pour la mise en place du système.

Monnaie et climat ?

Int. : En quoi les monnaies complémentaires peuvent-elles résoudre les problèmes climatiques ?

B. L. : Pour tenter denrayer les problèmes liés au changement climatique, il faudrait que des entreprises comme Exxon Mobil mettent en place des stratégies basées non pas sur les résultats financiers du prochain trimestre, mais sur un horizon dune centaine dannées.. Tant que leur souci sera doptimiser les opérations du trimestre suivant, cela ne fonctionnera pas. La vision à court terme, qui est une caractéristique de notre civilisation, est programmée par notre système monétaire. Par définition, toutes les monnaies bénéficiant dun taux dintérêt positif escomptent le futur. Mais pour les spéculateurs et la plupart des chefs dentreprises, ce futur nexcède pas 5 ans.
Mais cela na pas toujours été comme ça. Lorsquil fallait cent à cent cinquante ans pour bâtir une cathédrale, il se trouvait bien des communautés pour en financer la construction. Ils nétaient pas fous, mais possédaient tout simplement un modèle monétaire différent, qui sappuyait sur le système du "demeurage”, équivalent à un taux dintérêt négatif . Un tel système était utilisé au Moyen-âge et encourageait des projets sur le très long terme.
Nous travaillons actuellement à lélaboration dune monnaie, le Terra, qui sappuie sur ce principe. Le Terra est un reçu dinventaire dun panier de matières premières mondiales critiques, dont le coût du stockage est payé par le porteur de la monnaie. Son taux dintérêt est donc négatif, comme le Wara ou le Chiemgauer, ce qui décourage de les garder trop longtemps. Dans le cas du Terra, cest le coût de stockage des matières premières sur laquelle cette monnaie sappuie qui représente ce taux dintérêt négatif. Cest le même principe que le péage dun parking : le prix de la place de parking ne dévalue pas la valeur de votre voiture, mais cela vous coûte de la laisser longtemps au même endroit. Lorsque lon escompte une monnaie comme celle-là, le long terme devient profitable. Le Terra est une monnaie à grande échelle qui a été conçue de manière à convaincre les entreprises à penser loin devant. Elle a été imaginée comme une monnaie susceptible de se substituer aux dollars dans le cas où la monnaie américaine seffondrerait.

Le juste prix

Int. : Je reste convaincu par le rôle social de la monnaie complémentaire tel que vous venez de lexposer, mais jaimerais vous poser une question en ma qualité dentrepreneur. Contrairement à ce qui a été évoqué tout à lheure, je ne pense pas que le problème de la confiance soit si complexe à résoudre : il la déjà été en partie avec des dispositifs commerciaux comme les traites, où lon promet de payer à une certaine date. Ce qui mennuie davantage, cest la question du prix : comment rattache-t-on le prix dun bien à une valeur exprimée en monnaie complémentaire ? Je ne saurai pas, par exemple, à combien de WIR vendre un bien que je fabrique.

B. L. : Je vais vous apporter une réponse très simple. Sil est difficile de gagner des euros, il est très facile den dépenser. Il vous suffit dinverser la vapeur ! Dans une monnaie complémentaire, il vous suffit de savoir à quoi vous allez lutiliser avant de laccepter. Si vous savez à quoi vous allez dépenser vos WIR, vous savez ce quils valent. Cest tout. Ce nest pas plus difficile que de penser en euros.

Notes:
1 www.ithacahours.com
2 fr.wikipedia.org/wiki/Chiemgauer
3 “Offre cours déconomie, demande cours de soudure“ : le succès des réseaux déchanges réciproques de savoirs Claire HéBER-SUFFRIN, Jean-Jacques PIARD, séminaire Vies Collectives, mai 1997.

Présentation de lorateur

Bernard Lietaer a été actif dans le domaine des systèmes monétaires durant 30 ans dans une inhabituelle variété de fonctions. A la Banque Nationale de Belgique, il était responsable pour la mise en oeuvre du mécanisme de convergence (ECU) vers le système européen de monnaie unique. Durant cette période, il était également président du système belge de paiement électronique. Il est lauteur de 15 livres écrits an 5 langues, dont The Future of Money traduit en 18 langues. Son ouvrage le plus récent en Français est intitulé Monnaies Régionales : De nouvelles voies vers une prospérité durable. Plus dinformations sur lauteur sont disponibles sur www.lietaer.com.

Source by Marco Saba

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